Un cul de passage

 

C’est devenu récurrent. Au point où je commence à me poser des questions.

Est-ce que c’est de ma faute ? Qu’est ce qui dans mon attitude attire ce genre de réaction ?

Alors que je sais que je ne devrais pas me les poser. Que le problème ne vient pas de moi.

 

De quoi est-ce que je parle ? De ça :

« Mademoiselle t’es trop belle ! »

« Hey Miss ! Hey Miss ! T’a des trop bonnes fesses sérieusement ! »

« Excuse-moi ? C’est toi que j’ai vu sur la Ligne 14 t’aleur ? C’est possible qu’on fasse connaissance ? »

« Allez chérie passe ton numéro ! »

 

De ce sentiment de se sentir comme de la nourriture lorsque je me déplace à Paris. Vous avez du entendre et lire des tonnes d’articles sur ce sujet mais j’avais besoin de le sortir de moi.

Cette manière qu’ont certains hommes de me regarder, de m’aborder dans la rue comme si je n’étais que de la chair en mouvement, un vagin sur pattes…

Ils peuvent être seul ou en groupe. L’effet reste le même.

Alors bien sûr, au début, on ne s’en soucie pas. On ne regarde pas. On reste hautaine et on prend ça de haut.

Mais ces derniers-temps, ça y’est, ça a commencé à m’atteindre.

Ces regards. Ces paroles.

 

Je finis par en devenir parano, je surveille ma manière de m’habiller et je demande à Muscade si telle ou telle tenue est trop sexy.

Mais finalement, ça n’a rien à voir. Que je sois en pantalon ou en jupe, mon manteau et mon écharpe couvrant le tout, les agressions sont les mêmes.

Ça ne peut être qu’un regard qui me déshabille de la tête aux pieds. Mais ce regard me dégoûte tellement que parfois j’ai envie de hurler quand c’est la troisième fois dans la journée.

 

Aujourd’hui, en sortant de réunion au travail, en fin d’après-midi, je marche jusqu’à ma bouche de métro. Quelques mètres avant celle-ci, je vois un groupe de jeunes hommes avachis le long de la rambarde qui permet de descendre les escaliers.

J’avance en faisant mine de regarder mon téléphone, un air totalement détaché sur le visage.

Avant que je ne parvienne aux marches, trois ou quatre m’avaient plus ou moins encerclée en rigolant.

« Mhhhh… Sexy… Tu me passes ton numéro ? »

Je m’esquive sur la droite pour passer malgré leur barrage. J’en fixe un auquel j’envoie un regard noir avant de descendre. J’entends derrière moi :

« Hé ! Franchement t’es trop bonne ! J’te baise quand tu veux ! »

Et je les entends tous éclater de rire. A aucun moment, je n’ai montré de signe de peur parce que le problème n’est pas là. Je n’ai pas peur.

Il était à peine 18h.

Il faisait encore jour en heure de pointe.

 

C’est ça qui me dérange. C’est que rien n’est plus un problème. Plus rien ne les étouffe.

Et je subis ça. De plus en plus.

Qu’est-ce que ce sera en été lorsque j’aurais des tenues plus légères et qu’ils verront véritablement ma peau ?

Je ne généralise pas du tout. Mais le problème c’est que je me mine pour quelque chose sur laquelle je n’ai aucune prise. Parce que c’est quelque chose qui est comme ça et contre laquelle je ne peux pas lutter. A part m’en plaindre. Et c’est plus que rageant.

 

• Un article que je viens de trouver sur le sujet : La rue, fief des mâles
• Ce que j’écoute en vous écrivant : Biffy Clyro – Opposite