Mars 2008
Je peine à ouvrir les yeux. Mes paupières semblent si lourdes.
Dans un effort qui semble surhumain, je soulève mon corps du lit tandis qu’une puissante douleur à la tête m’étourdit.
Le goût métallique de ma langue contre mon palais n’est rien comparé à la nausée qui me tort les boyaux.
Je regarde autour de moi.
Où suis-je ?
Il fait si sombre. Je discerne les meubles parfaitement agencés.
Une chambre d’hôtel.
Dans un réflexe, je regarde à ma gauche.
Mr Goyave.
J’attrape ma tête dans mes mains. La Terre tourne un peu plus vite.
Un coup d’œil à l’horloge sous l’écran plat en face de moi : 9h57
Quel jour sommes-nous? Dois-je aller en cours ? Suis-je déjà en retard ?
Je me tourne de nouveau vers le corps de Goyave qui respire lourdement.
« Goyave… On est quel jour? »
Pas de réponse.
Je le secoue doucement pour le réveiller. Au bout de quelques secondes, dans un demi-sommeil, il m’attrape et me tire contre lui. Je me retrouve tout à fait contre lui.
Ce brusque mouvement remue mon estomac et réveille ma nausée.
« Nous sommes quel jour Goyave ?! »
Soupir de sa part. Il ouvre les yeux. Brusquement. Comme à son habitude. Ces pupilles noisette sont extrêmement dilatées. Il n’est pas totalement sobre.
Il passe sa main sur son visage et se redresse dans le lit pour prendre son téléphone.
Je me lève et avance, nue, au centre de la pièce obscure.
Son téléphone s’ouvre dans un bruit métallique.
» Lundi. » articule-t-il de sa voix rauque.
Mon cœur rate un battement. Je serre les dents pour ne pas vomir sur la moquette blanche.
J’attrape un de mes jeans qui trainait sur un fauteuil proche de la télé.
Sans sous vêtement, je l’enfile avant de chercher mon soutient gorge du regard.
« Qu’est-ce que tu fous…? »
Je ne lui réponds pas.
Je suis en retard en cours. Et en retard d’une bonne vingtaine de minutes. Et où est-ce soutien-gorge ? Et mon téléphone?
« Cerise… Tu n’as quand même pas dans l’idée d’aller en cours là..? »
En trébuchant sur un cendrier, mes genoux heurtent douloureusement le sol.
Goyave continue de parler, calmement.
« Je ne sais pas ce que tu fabriques là… »
« Je fabrique que j’ai cours Goyave ! Je suis en prépa ! Je ne peux pas rater mes cours comme ça ! J’ai une année à faire, des concours à passer… »
Dans le noir, je lutte contre les attaches de mon soutien-gorge qui refusent de s’attacher correctement.
» Tu as au moins conscience que nous ne sommes même pas en France, n’est-ce pas ? »
Je me fige.
Mon cerveau semble tellement lent. Et cette nausée si lancinante.
« Où sommes-nous? »
« A Genève. »
J’avance à demi-vêtue vers les grandes fenêtres de la chambre. En plissant les yeux, j’entrouvre un pan du rideau.
Je ne sais pas si c’est Genève mais ce n’est certainement pas Paris.
Cette certitude me coupe les jambes et mon cœur se soulève pour la énième fois.
A toute allure, je sors de la chambre pour me précipiter, la tête la première, vers la cuvette des toilettes.
Mon corps se contracte et tandis que je me vide, mon cerveau se blanchit…
Je sursaute lorsque je sens les mains chaudes de Goyave dans mon cou.
Il relève mes cheveux.
Quelques minutes plus tard, je suis nue dans la baignoire, le corps immergé dans de l’eau tiède.
Je réussis à murmurer : « Pourquoi est-ce que tu me fais boire? »
« Je ne te fais pas boire, tu le fais très bien toute seule. »
Je ne réponds rien. Je le regarde, assis sur la chaise en fer forgée en face du lavabo immaculé, la tête dans les mains.
« C’était l’anniversaire de qui ? »
» De personne. C’était l’inauguration d’une boîte… »
Mon esprit est tellement brumeux. Je glisse dans l’eau jusqu’à ce que mes yeux soient immergés.
Je ne me souviens que de quelques fragments de la nuit. Et ceux-là sont amplement suffisants.
Je sors mon visage de l’eau et toujours les yeux fermés, je lui demande :
« Ça rime à quoi? »
» On s’amuse. On est jeunes, Cerise… Tu es jeune. Rien n’est important. »
Je le coupe m’exclamant : » Si justement ! C’est important Goyave ! »
Je le regardais. Mes yeux douloureux plongés dans les siens.
« Pourquoi est-ce que tu cries? »
« Parce que je suis fatiguée ! »
« Alors repose-toi… Je te mets dans un avion cette après-midi. »
Il se lève pour sortir de la salle de bain.
Dans l’entre bâillement de la porte, il me demande en me faisant dos :
» Tu m’aimes ? »
Je réponds sans la moindre hésitation.
« Oui. Bien sûr. »
Je me suis réveillée aujourdh’ui en repensant à cette scène, ce souvenir… J’ai voulu vous le partager.
Un souvenir peut-être juste froid. Sans but. Un simple souvenir comme celui d’une autre vie….
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- Ce que j’écoute en vous écrivant : Half of My Heart – John Mayer
Grace
août 16, 2014Tu écris vachement bien!!
Mlle Cerise
août 19, 2014Oh merci beaucoup Grace ! Bisous, Cerise
Geny║MarronChantilly.fr
mars 24, 2014J’adore ton récit. On a tellement l’impression d’y être!
Mlle Cerise
mars 24, 2014Mercii ! <3
Illyria
mars 18, 2014D’ailleurs ça fait plaisir de te voir aussi souriante et épanouie sur les photos de ton blog, ça change de tes articles sur tes histoires « chaotiques » 🙂
Mlle Cerise
mars 24, 2014=D Merci beaucoup ma belle ! Oui je me sens mieux, je pourrais même dire « bien » ! Bisous, Cerise
Kimie (de Mots et Emaux)
mars 17, 2014J’aime quand tu fais des articles sur tes souvenirs, on a tellement l’impression d’y être !
Mlle Cerise
mars 24, 2014=) J’aime que tu apprécies ! Ca me fait très plaisir !
Du Rouge sur mes Lèvres
mars 17, 2014Je veux la suite, la suite !
Enfin je dis ça mais j’espère que ça n’est pas un souvenir encore douloureux.. 🙁
Mlle Cerise
mars 24, 2014HAHAAH ! Stéphanie…! Mais il n’y a pas de suite… Ce sont des choses dont je me souviens comme ça… =)
Tout s’est bien fini, la gueule de bois mis à part, j’ai pris l’avion quelques heures après… Merci de me lire et de commenter en tout cas ! Bisous, Cerise